20 septembre 2008

Comment écrire sur les célébrités gays et lesbiennes

Sarah Warn, la fondatrice d'AfterEllen, a désormais sa chronique sur le site d'informations LGBT américain 365gay.com. Et elle y pose une excellente question: à partir de quand peut-on considérer qu'une célébrité est sortie du placard? Il n'y a pas si longtemps, les choses étaient simples. Tant qu'une personne n'avait pas dit qu'elle était lesbienne ou gay, elle était considérée comme dans le placard, et les médias homos risquaient l'outing à chaque fois qu'ils parlaient d'elle. Mais les choses ont changé, la société dans son ensemble mais aussi les gays et les lesbiennes eux-mêmes. C'est le “cas” Lindsay Lohan qui est à l'origine des interrogations de Sarah Warn. Alors que les frasques de certaines jeunes femmes ont commencé à être abondamment commentées par la presse généraliste, et notamment les tabloïds, Sarah Warn a décidé qu'AfterEllen ne suivrait pas cet intérêt malsain pour les habitudes auto-destructrices d'une Britney Spears, Paris Hilon ou Lindsay Lohan. C'est ainsi que s'est installée la règle du “no Britney, Paris or Lindsay”, raconte-t-elle. Et c'est ainsi que quand les rumeurs sur la relation entre Lindsay Lohan et la DJ Samantha Ronson ont fait leur apparition, AfterEllen ne s'en est pas fait l'écho. Contrairement à ces fameux tabloïds qui ont tous les jours, ou presque, quelque chose à écrire sur le couple, commentaires souvent débiles, généralement méchants, sur le chapeau de Samantha (surnommée SaMANtha par Perez Hilton, le blogger qui terrifie Hollywood et qui en l'espèce fait preuve d'une misogynie et d'une lesbophobie abberrantes) ou le fait que les deux jeunes femmes portent le même bracelet. Des sujets fascinants, quoi.
Toujours est-il que la relation, non définie, entre Lindsay et Samantha dure depuis deux ans maintenant, qua Lindsay Lohan semble avoir changé (si les tabloïds parlent de ses bracelets, c'est aussi parce qu'ils n'ont rien de plus croustillant à se mettre sous la dent) et que Sarah Warn a donc choisi de changer son fusil d'épaule. Attendez-vous donc à lire des articles sur Lindsay lorsque l'actualité le justifiera.
Et Sarah Warn de rappeler que pendant longtemps AfterEllen n'a pas écrit sur Jodie Foster, jusqu'à ce que celle-ci semble vivre sa vie plus ouvertement sans jamais faire de coming-out officiel.
Alors, où se situe la frontière? À quoi reconnaît-on qu'un acteur ou une chanteuse est out? Suffit-il que la personne censée être sa moitié l'accompagne une fois à une avant-première? Ou faut-il un mariage en bonne et due forme (ça ne va pas être facile en France)? Comment distinguer le sportif gay qui vit simplement sa vie sans se poser de question et la femme politique enfermée à double tour dans son placard? Comment ne pas ignorer le premier, qui ne le souhaite pas, ni outer la seconde, qui ne le souhaite pas plus? L'avenir de notre métier de journaliste s'annonce passionnant, et Yagg sera probablement en première ligne sur le sujet. Mais pour rendre l'évolution vraiment révolutionnaire, il faudrait que tous les médias, homos ou non, se remettent en question sur leur façon de traiter la question. Et ça, c'est loin d'être gagné!

Lire aussi le point de vue du site frère d'AfterEllen, AfterElton.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Excellent papier et judicieuses interrogations. Encore est-il plus aisé de nos jours de se "dévoiler", même si la partie est loin d'être gagnée, et que les railleries visant les lesbiennes n'ont jamais été si perfides. En ce qui me concerne, c'est à la sortie de mon premier livre, "Elle", en 1988, que mon homosexualité a été révélée. A l'époque je la planquais, il n'était pas question qu'à mon travail on se doute de quelque chose. J'aurais pu prendre un pseudo, mais j'ai assumé - ça n'a pas été facile, on a même jeté des pierres sur le toit de ma maison ! Curieusement, c'est mon passage chez Pivot qui a tout arrangé. Du jour au lendemain, on m'a considérée comme "artiste", et alors dans ce cas j'avais le droit de faire joujou avec les filles, on fermait les yeux là-dessus !
Bref, bravo pour cet article : il est nécessaire de relancer régulièrement ce genre de sujet !
Martine Roffinella.

Judith Silberfeld a dit…

Merci pour le message et les compliments. Et merci d'être fan de ma mère, au passage :-).
Bizarrement, je n'ai pas lu vos livres, même si je vous connais de nom. Je vais m'empresser de combler cette lacune! À très bientôt de vous lire, donc, sur papier ou sur la toile.

Anonyme a dit…

Je vous connaissais de nom aussi, mais comme je vis comme une nonne, sans aucune vie sociale, nous n'avions aucune chance de nous rencontrer ! C'est très très bien, ce que vous faites - j'irai désormais régulièrement sur votre Blog.
Oui, je suis fan, et depuis longtemps, de votre mère - et j'enrage de voir comment on traite nos meilleures plumes dans ce pays. De plus j'ai été ulcérée de constater à quel point les gens se fichaient complètement de ce qui se passait dans "le quotidien de référence". Si les lecteurs s'étaient mobilisés, nous n'en serions pas là. Je me suis trouvée bien seule... Pire : on s'est moqué de moi ! Remarquez que je m'en fiche bien... Ma fidélité aux personnes que j'admire depuis tant d'années est et sera sans faille.
Là-dessus, je vais précisément acheter la presse...
Bon week-end à vous, et continuez de nous écrire de si bons papiers...
Martine, dite Roffi.